mardi 6 janvier 2009

LE TÉMOIGNAGE DE CHIMINO

par LarryCool (carapace d'acier, cœur d'or)

Je vous livre ce jour, un témoignage bouleversant émanant d'un rescapé ayant vécu dans le Comté de Saxe sous le joug et la terrible répression des prévôts et baillis de ce même Comté, puis vendu comme esclave.

L'oppression que ces hommes et femmes ont subi nous touchera, n'en doutons pas, et doit interpeller aussi bien les hommes, les femmes que les enfants.

Nous sommes à l'aube de l'avènement des valeurs morales et nous vivons à une époque à laquelle ces mêmes valeurs ne sont pas encore objectives, aussi la prise de conscience est-elle nécessaire pour redonner à l'Homme, sa dimension d'Homme...

Notre témoin a fait l'expérience de la cruauté du monde et d'un système politique qui la perpétue.
Je demande à tous les lecteurs de réfléchir sur ce témoignage et qu'enfin de "passifs " nous passions à " combattifs ".

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Le témoignage de Chimino

" J'avais 13 ans à l'époque des faits, je vivais avec ma mère LOLANA et ma petite sœur SWANN dans le Comté de Saxe. Nous subissions sans cesse la répression et la tyrannie des hommes du Comte qui nous accablaient d'impôts outrageants et nous frappaient lorsque nous ne pouvions pas payer.
" Notre père fut enfermé dans les prisons du Comte pour avoir pris parti pour les paysans dont on exigeait un trop lourd tribut. Lorsque mon père fut arrêté, torturé et emmené, il eut le temps de me dire ceci : Un homme fermé à la pitié n'est pas humain, sois dur pour toi-même et généreux pour les autres...
" Nous apprîmes la mort de mon père quelques jours plus tard, on nous jeta sa dépouille devant notre porte, horriblement mutilé...

" Nous décidâmes alors de fuir le Comté et sommes partis dans le Nord. Au cours de notre périple, nous fûmes capturés par des marchands d'esclaves qui vendirent ma mère à un riche Duc dans une île lointaine. Ma sœur et moi fûmes vendus à un prévôt dans une province du Danemark, ce prévôt travaillait pour le ministère de la justice de son pays.
" Ses méthodes étaient féroces et impitoyables, nous devions travailler comme des bêtes et tous ceux qui tentaient de s'enfuir, hommes ou femmes, jeunes ou vieillards, étaient marqués sur le front au fer rouge.
" Une seule personne nous accorda un peu d'égard, le fils du prévôt qui n'approuvait pas les méthodes de son père...

" Les années passèrent, je me suis endurci, seule ma soeur était restée la même, douce, fluette, apeurée, tendre, me reprochant ma perte de sensibilité...
" Ma sœur apprit
alors de la bouche d'une esclave récemment arrivée que, sur une île non loin d'où nous étions, vivait une Dame fort digne qui chantait continuellement la même complainte dans laquelle revenaient sans cesse deux noms : Chimino et Swann.
" Je décidai alors de m'enfuir avec ma sœur, mais celle-ci refusa, ne se sentant plus capable de perpétuellement fuir. Elle me conseilla alors de partir seul et pour éviter de parler sous la torture, ma sœur....se suicida en s'égorgeant.

" Après de nombreuses péripéties, des peurs, des cachettes, je débarquai sur l'île où ma mère devait se trouver. Je me rendis au château du gouverneur de l'île et demandai un entretien. Je fus immédiatement emprisonné pour mon audace, puis on m'accorda audience.
"Le gouverneur était un homme ferme mais juste, il regretta le sort que l'on nous avait infligé et édicta une loi interdisant l'esclavage sur tout son territoire, fit arrêter le prévôt et l'exila.
" Avec l'aide du gouverneur je retrouvai ma mère dans un petit village de pêcheurs sur cette île, ma mère avait eu les yeux brûlés et était devenue aveugle, elle me toucha et me reconnut, demanda des nouvelles de Swann... Lorsque je lui eut narré les évènements de ces dernières années, ma mère tomba à genoux et me dit : Il n'y a plus que nous deux désormais...
" Je tentais de la convaincre de redescendre en France où, disait-on, se trouvait un village nommé Pontarlier qui accueillait les gens en souffrance et qui s'occupait d'eux. Mais ma mère refusa de partir: elle n'aurait pu entreprendre un tel voyage dans l'état où elle se trouvait.
"J'en avertis le gouverneur qui la prit en charge, mais ma mère mourut peu de temps après de malnutrition et de faiblesse...

" Alors j'entrepris seul le chemin du retour, désormais j'étais un homme meurtri, définitivement meurtri... Mais j'ose croire encore à la bonté de l'existence humaine... à la solidarité de l'espèce et à la justice.... J'ai tout perdu... Sauf mon âme ".

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